Un train de pensée [...]
Je me souviens de cette toute première fois où je l’ai vu. J’ai eu un à priori tout à fait ridicule, un faux jugement qui aurait bien pu me porter préjudice…
Ses premiers mots, cet effet étrange qu’il a eu sur moi. Je me suis comme sentie inférieure, je n’ai pas aimé ça. Au fil des jours l’envie d’être plus féminine me gagnait, mais il était difficile de l’être vu le travail que j’exerçais. Qu’importe, je voulais lui plaire. Étrange… A cet instant précis je m’étais imposée des barrières, car il était difficile de résister face à cette vague déferlante que sont les sentiments. Un petit bonjour timide, puis toute une conversation débute. Les semaines passent, et les phrases se rallongent, les sujets sont plus variés, tout semble devenir plus simple. Mais aussi plus dangereux.
Un soir, après deux longs et éprouvants services, je m’apprêtais à rentrer chez moi, la boule au ventre. Je ne me souviens plus pourquoi exactement, mais je me souviens de cet été comme étant l’un des plus longs de ma courte existence. Ah oui, je me rappelle. C’est parce mon monde entier s’était écroulé.
Une fois terminé, je suis sorti du restaurant. Je l’avais vu partir un peu plus tôt, et pourtant il était bel et bien en face de moi.
"Tu es libre demain ?"
Croyez le ou non, mais cette phrase m’a fait rougir de bonheur. Cependant, l’anxiété me gagnait d’autant plus. Que dire ? Que faire ? Est-ce un rendez-vous ?
Plus de deux mois ainsi. Dans l’incertitude.
Durant cet été j’ai eu un comportement assez étrange, je dois l’admettre. Je me souviens d’une soirée, où deux jeunes filles n’arrêtaient pas de lui tourner autours… Ah, douce jalousie qui ce soir-là m’a fait péter un câble.
Au final un quotidien s’était installé délicatement, sans que je ne m’en rende compte. C’est étrange de constater à quel point tout devient plus simple lorsque cette personne vous correspond. Je me suis sentie comme utile grâce à mon travail, et féminine grâce à un Homme. Je n’ai pas besoin de relire mes articles pour constater que c’étaient ces deux points-là qui me faisaient le plus mal. Mais qu’importe. Se sentir vivante. Quelle douce sensation dont j’avais perdu le goût.
Chaque jour je savais pourquoi je me levais le matin.Cela peut sembler "banal", mais avoir un objectif donne réellement envie de poser un premier pied à terre. Sinon, c’est l’errance. Je ne sais que trop bien ce que c’est.
Le tout dernier jour m’a fait l’effet d’une pique en plein cœur. Était-ce la dernière fois que je le voyais ? Je posais un regard furtif en sa direction, afin qu’il n’éveille aucun doute. Je sais, j’ai toujours des appréhensions, elles sont venue avec l’expérience.
Puis un jour. Deux jours. Puis trois. Au final une semaine s’écoule. Puis un appel.
Je me souviens de cette journée comme étant la journée parfaite.
La météo était au beau fixe, mon cœur était vaillant et bourré de joie. Je me souviens de cette ivresse, de toute cette excitation lorsque je l’ai cherché parmi la foule. Puis j’ai croisé son regard. Le temps s’est arrêté. De toute mon existence, jamais je n’avais autant désiré quelqu’un. Et le voilà qui était en face de moi. L’effet d’une bombe. Je l’ai vu dans un tout autre contexte, sous un autre jour. Cette journée était plus intime, sans qu’aucun élément perturbateur ne vienne interrompre quoi que ce soit. Pas de boulot, pas d’appel, pas de rencontre en ville. Journée parfaite. Lorsque je me suis réveillée de ce petit rêve pourtant bien réel, il faisait déjà presque nuit. Pour la toute première fois j’ai senti comme un regard bienveillant. Une douce chaleur humaine, sans aucun contact. Je me suis sentie comme libre.
Je me souviendrais de ce sentiment toute ma vie. Ce jour-là j’étais Heureuse.
Et depuis, je ne cesse de rire à ses côtés.